Mémoire rouge et noire : l’histoire du supportérisme rennais

De l’inauguration du parc des sports à aujourd’hui, le supportérisme rennais s’est construit dans l’adversité et continue encore de faire vibrer les tribunes de la route de Lorient toutes les 2 semaines. Retour sur l’histoire de la ferveur rouge et noire.

Le développement d’un spectacle hebdomadaire et central pour la cité :

Créé en 1901 par 4 étudiants rennais, le Stade Rennais Université Club évolue durant ses premières années sur un terrain près de la Mabilais. Trop souvent inondé à cause de sa proximité immédiate avec la Vilaine, le club décide de changer de terrain et emménage au parc des sports du Moulin du Comte en 1912. Il est officiellement inauguré le 13 octobre à l’occasion d’une rencontre opposant le SRUC aux parisiens du Racing Club de France. Cet événement attire plus de 3000 personnes qui garnissent l’unique tribune en bois du stade côté Vilaine.

Dans les premières décennies du XXème siècle le club commence à se structurer. Les oppositions contre le grand rival de l’époque l’US Saint Servannaise puis la professionnalisation du club dans les années 1930 attirent une foule de plus en plus importante.

Les années d'après-guerre sont marquées par un engouement croissant autour du club. En effet, la réindustrialisation que connaît la France suite à la seconde guerre mondiale entraîne un exode rural des bretons vers Rennes qui connaît un développement démographique important. Les ouvriers qui travaillent la semaine au sein des nouvelles usines comme PSA, se dirigent en partie vers le stade le week-end. Des travaux sont entrepris pour accompagner cette croissance qui permettent la construction en 1949 de 2 tribunes derrière les buts ainsi que 4 tribunes aux angles du stade. 6 ans plus tard, de nouveaux travaux sont réalisés pour rénover la tribune Vilaine qui devient une tribune en béton et en créer une en face de cette dernière. Ce réaménagement du stade entraîne une augmentation de l’affluence les jours de match. Le Stade Rennais devient une institution centrale de la vie rennaise.


© Ouest France

Une Bretagne qui vibre en rouge et noir :

Les années 1960 et 1970 marquent l'âge d’or du club au XXème siècle. Emmenés par Jean Prouff, les rouges et noirs réalisent des parcours mémorables en Coupe de France. Vainqueurs du trophée en 1965, ils atteignent une nouvelle fois la finale en 1971 après avoir éliminé le Marseille de Skoblar et Magnusson dans un stade de Lorient garni de plus de 27 000 spectateurs, un record à l’époque. Le 20 juin plusieurs dizaines de milliers de supporters se rendent dans une ambiance festive à Colombes pour assister à la finale. Remportée sur le score de 1-0 grâce au penalty d’André Guy, elle laisse place à une explosion de joie entre les joueurs et le public qui envahit la pelouse. Cette communion se poursuivra le lendemain au retour des joueurs à Rennes, où une foule immense accueillera les héros pour les accompagner jusqu’à la Place de la mairie, rouge et noire de monde.

Ces exploits en Coupe de France ont eu une grande importance sur le retour sur le devant de la scène de la culture bretonne. Dans les années 1950 et 1960, les symboles bretons comme le Gwenn ha Du n’avaient pas bonne presse et étaient parfois assimilés à tort à la collaboration avec l’Allemagne nazie pendant la seconde guerre mondiale. Les victoires de 1965 et 1971 ont été l’occasion pour les habitants d’exprimer leur attachement à la Bretagne. C’est un lien fort qui s’est créé entre les Bretons et le Stade Rennais, le club étant le seul de la région à cette époque à jouer au haut niveau.

De l’instabilité des années 1980 aux nouvelles ambitions :

Les années 1980 et 1990 seront marquées par une forte instabilité financière et sportive qui terniront l’image du club auprès de son public. Il frôle la relégation administrative en 1977 et ne sera maintenu que grâce à la détermination d’Edmond Hervé, devenu maire quelques mois auparavant. Le public délaissera le stade dans les années 1980. Agrandit, il dépassera néanmoins rarement l’affluence des 10 000 spectateurs entre les années 1980 et la première moitié des années 1990. Le club ne cessera de faire l'ascenseur provoquant la fatalité voir l’irronisme de ses propres supporters, s’exprimant à travers le fameux “ Qu’est ce qui est rouge et noir, qui monte et qui descend ? Le Stade Rennais “.

© Ouest France

Cette instabilité prendra fin dans les années 1990 avec l’arrivée de François Pinault dans un premier temps en tant que sponsor. Il devient propriétaire du club à l’été 1998 et le lance vers de nouvelles ambitions. Son arrivée permet la construction du centre d'entraînement de la Piverdière et la rénovation de l’enceinte entre 1999 et 2004 qui se dote d’une capacité de 30 000 places. La stabilisation du club dans l’élite accompagné du retour en Coupe d’Europe permet de relancer une bonne dynamique. Des matchs mémorables comme la réception de la Juventus de Zinédine Zidane ou la victoire à la Beaujoire après 41 ans de disette participent à faire revenir le Stade Rennais dans le cœur des gens. Des joueurs comme Alexander Frei, Olivier Monterrubio ou encore John Utaka contribuent au regain de l’institution. 

Mais il manque un titre majeur ou une épopée au club pour le faire devenir plus grand et le début des années 2010 ne l'aidera pas à lui faire passer ce cap. En 2009, le club est battu en finale de Coupe de France par l’En Avant Guingamp alors pensionnaire de Ligue 2. Cette performance sera rééditée en 2014, un an après une nouvelle défaite en Coupe de la Ligue face à l’AS Saint Etienne. Certains interprèteront ces 2 succès de l’équipe costarmoricaine, comme la victoire de la Bretagne rurale face à la Bretagne urbaine. Ce plafond de verre contre lequel est bloqué le club va se ressentir sur l’affluence du Roazhon Park, renommé en 2015. Les supporters délaissent le stade dans les années 2010 avec une affluence qui dépasse rarement les 20 000 spectateurs les soirs de matchs. 

Le changement de dimension depuis les années Coupe d’Europe :

La saison 2018-2019 va tout changer. Le retour du Stade Rennais en Ligue Europa, après une 5ème place obtenue sur l'exercice précédent, corrélé à de nouvelles ambitions depuis l’arrivée de Olivier Létang, permet au club de passer ce cap. Le club atteint les 8èmes de finale en Coupe d’Europe, après une victoire héroïque à Séville au stade précédent. La réception d'Arsenal provoque un engouement encore jamais vu. Une queue immense de plusieurs centaines de mètres se crée devant le stade le matin de l’ouverture de la billetterie, certains n’hésitant pas à passer la nuit dehors en plein hiver pour espérer décrocher le précieux sésame. Le soir du match, c'est un Roazhon Park incandescent qui est décidé à pousser les hommes de Julien Stephan vers l’exploit. Un tifo sur l’ensemble des tribunes est déployé à l’entrée des joueurs. Dans une ambiance irréelle, les joueurs réalisent l’exploit de battre les gunners 3-1 grâce notamment à une demi-volée extraordinaire de Benjamin Bourigeaud qui fera exploser le stade. Les rouges et noirs seront malheureusement éliminés au match retour après une sévère défaite sur le score de 3-0. 

© Onze mondial

Mais le point d’orgue de cette saison se situe le 27 avril 2019. Ce jour-là, la Bretagne toute entière se donne rendez-vous à Saint-Denis pour affronter en finale de Coupe de France le Paris Saint Germain. Cette soirée rentre dans la légende du club lorsque Christopher Nkunku, 6ème tireur parisien d’une séance de tirs aux buts irrespirable envoie sa frappe au-dessus des cages rennaises. Thomas Koubek et l’ensemble de ses coéquipiers se ruent vers le virage rouge et noir situé de l’autre coté du terrain pour célébrer avec les 30 000 supporters rouges et noirs présents. Après tant d’espoirs déchus et de finales perdues, le club vainc enfin le signe indien et remporte son premier trophée depuis 48 ans. 

Cette saison historique a eu une influence directe sur l'intérêt pour le club qui ne cesse de croître depuis. L’affection pour le Stade Rennais dépasse désormais largement les frontières géographiques de la Bretagne. Une enquête IPSOS réalisée en 2023 dévoile que plus de 10 millions de français se déclarent intéressés par le club. Elle rapporte également que seulement 37% des supporters rouges et noirs vivent en Bretagne. 

Toute cette ferveur autour du club se ressent à travers les demandes d’abonnements toujours plus nombreuses chaque année. Le club alimente cette passion en mettant un point d’honneur à valoriser le patrimoine local. Elle se ressent à travers la mise en avant de la Bretagne par la diffusion du Bro Gozh Ma Zadoù à chaque match, par l’ouverture de la galerie des légendes en 2019 ou encore par l’organisation de journées spéciales réservées aux supporters comme “ Il était une foi “. Les initiatives de transmission de la culture rennaise aux supporters adverses, comme ce fut le cas lors de la réception de l’AC Milan avec l’offre de galettes saucisses et d’un city guide, participent directement à la bonne image renvoyée par le club. 

© stade rennais online

Enfin la dynamique positive autour du club s’explique également par l’engagement et le travail que fournit au quotidien le Roazhon Celtic Kop. Depuis presque 35 ans, ils font vibrer les tribunes rennaises. Leurs tifos déployés à l’entrée des joueurs ont une renommée nationale voire internationale depuis le passage dans La Casa de Papel du tifo révélé en mai 2018 pour fêter le retour en Coupe d’Europe. L’organisation de déplacements historiques comme celui réalisé il y a deux saisons à Milan, où plus de 10 000 supporters se sont réunis en Lombardie, et leur soutien sans relâche à tous les matchs font aujourd’hui de l’ambiance rouge et noire, l’une des plus belles de France.

Depuis 1901 le public vibre pour le Stade Rennais et le Stade Rennais vit par son public.


Axel LECHARTIER

L’Hebdo Rennais – par Team SRFC

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Par TEAM SRFC

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